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Monsieur Grapinet et la réforme du cadastre

Commentaires facebook de notre camarade Olivier DELEMAR sur la réforme du cadastre

Monsieur Grapinet est un homme intègre.

Monsieur Grapinet est passé par le Prytanée de La Flèche, école militaire prestigieuse s’il en est, puis sortira de l’ENA - promotion Condorcet - pour devenir Inspecteur des Finances.

Il s’emploiera à mettre en mouvement le grand projet de refonte du système informatique des services fiscaux selon les normes alors en vigueur dans le monde informatique, le projet Copernic. Autant dire qu’il connaît bien le système d’information de la Direction Générale des Finances Publiques (la DGFiP est issue de la fusion des Impôts et du Trésor).

Monsieur Grapinet est un homme bien placé.

Attiré, comme de nombreux inspecteurs des finances par les sirènes du privé, Monsieur Grapinet va rejoindre la direction du Crédit Agricole, puis du Groupe Atos où il prendra la tête de la filiale Worldline, une société spécialisée dans le paiement électronique. Dans le milieu, on appelle cela le "pantouflage".

Mais monsieur Grapinet est un homme entreprenant.

Les occasions de payer sont nombreuses, et les automobilistes un peu trop enthousiastes en connaissent au moins une : l’amende pour excès de vitesse (ou tout autre infraction d’ailleurs). Et pour payer son amende plus facilement, le gouvernement met à votre disposition www.amendes.gouv.fr, un site de payement en ligne derrière lequel on retrouve... Worldline  ! Je ne pense pas m’avancer de manière trop hasardeuse en prédisant que l’activité de Worldline n’est pas prête de diminuer.

Monsieur Grapinet est un homme chanceux.

Mais la bonne fortune ne s’arrête pas là ! Vous n’êtes pas sans ignorer la RPCU  : la Représentation Parcellaire Cadastrale Unique, un projet de fusion de tous les cadastres de France - qui sont maintenant départementaux après avoir été longtemps communaux - en un seul plan national, un travail gigantesque sur lequel le Cadastre et l’IGN planchent depuis quelques années déjà.

Mais, mais, mais... Le cadastre est un service public (voulu par Napoléon d’ailleurs, celui qui a voulu aussi le Prytanée de la Flèche, c’est amusant), alors que l’IGN est un EPCA, un Établissement Public à Caractère Administratif.
La différence ? Pour faire simple : les plans de l’IGN sont payants, les plans du cadastre sont gratuits.

Bref, le cadastre, comme tous les services publics, est dans le collimateur. Pas plus tard que début février dernier, la DGFiP a d’ailleurs demandé aux géomètres du cadastre de rester au bureau pour faire de la fiscalité. Vous imaginez le type qui a été formé pour faire des levés topographique avec des appareils hyper pointus, des triangulations, des relevés GPS, un type dont la vie est dehors, sur le terrain, à qui on demande dorénavant de faire des évaluations de valeur locative ? Bref, le pronostique vital du cadastre est sacrément engagé, comme disent les journalistes.

Mais qui va s’occuper de la RPCU alors ? Ben, l’IGN. Mais comme c’est un établissement public, on ne va quand même pas embaucher des types payés avec de l’argent public, non. Alors l’IGN a décidé d’externaliser ce travail au cours d’un conseil d’administration où siègent des fonctionnaires de la DGFiP (donc des anciens collègues de Monsieur Grapinet). Et à qui l’IGN va-t-il confier ce travail ? À la société Worldline bien sûr !

Monsieur Grapinet est un homme toujours au bon endroit au bon moment.

Article publié le 3 avril 2018.


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